Ce week-end, j’ai regardé une de mes séries préférées sur le monde de l’entreprise : Kaamelott.
Pour ceux à qui cela ne parle pas, c’est l’histoire d’une entreprise appelée « Le royaume de Logres », et plus particulièrement de son équipe dirigeante.
Cette société est organisée en filiales régionales et s’est constituée par croissance externe via des prises de participation majoritaire au capital.
La mission de cette entreprise est d’apporter la paix dans le monde (c’est Miss France qui serait contente). Pour cela, il faut « juste » trouver le Saint Graal.
La gouvernance du royaume de Logres est très lisible : Le CEO (le roi Arthur) entouré d’un comex constitué des DG régionaux et de certains membres des comités de direction régionaux.
La stratégie est simple : parcourir le monde chrétien pour collecter des indices, déterminer ensuite en comex quelles sont les pistes à suivre, puis monter des squads pour les tester.
On suit alors pendant six saisons les déboires du CEO. Car il s’agit bien de déboires. Spoiler alert : ils n’ont jamais trouvé le Saint Graal (mais je suis sûre que vous avez vu Indiana Jones et que vous le saviez déjà).
Les causes de cet échec sont nombreuses, mais voici les plus criantes à mes yeux :
❌ »Trouver le Saint Graal » n’est pas un objectif SMART ! Ils ne sont même pas d’accord sur la forme physique de l’objet (Une coupe ? Un vase ? Un récipient ? un bocal à anchois ?). D’ailleurs a-t-il une forme physique ?
❌L’organisation n’est pas AGILE : les réunions du Comex sont très protocolaires (armures obligatoires, compte rendu en latin, prises de décision sont longues, initiatives individuelles à l’encontre de l’intérêt collectif)
❌Les valeurs de l’entreprise ne sont pas partagées au sein même de l’équipe dirigeante. Le CEO les a définies en fonction de ce qui était important pour lui, mais elles ne s’incarnent pas dans l’état d’esprit et les échanges au sein même du Comex. Alors que comme le répète Perceval, le directeur régional du pays de Galles « l’important, c’est les valeurs ».
❌Le système de rétribution n’est pas aligné avec les attentes et les motivations de chacun. Les besoins sont très variés : l’enrichissement personnel, la renommée, le pouvoir, le sentiment d’appartenance, la liberté …
En synthèse : Atteindre un objectif flou est récompensé par quelque chose qui n’intéresse pas l’équipe dirigeante (sauver le monde n’est pas le moteur de tout le monde). Comment s’étonner de leur manque d’engagement ?
Au final, le CEO est seul, mais malgré son burn-out imminent il trouve l’énergie de défendre son bilan dans une séquence émouvante :
« Pour le Graal j’ai bâti une forteresse, moi. Kaamelott, ça s’appelle. J’ai été chercher des chevaliers dans tout le royaume. J’ai fait construire une grande table pour que les chevaliers s’assoient, ensemble. Je l’ai voulu ronde, pour qu’aucun d’entre eux ne se retrouve assis dans un angle, ou en bout de table. C’était compliqué, alors j’ai essayé d’expliquer ce qu’était le Graal, pour que tout le monde comprenne. C’était difficile, alors j’ai essayé de rigoler, pour que personne ne s’ennuie. J’ai raté, mais je veux pas qu’on dise que j’ai rien foutu, parce que c’est pas vrai »
Bien faire les choses ne suffit pas, il faut faire en sorte que cela se sache !
Même si on a les meilleures intentions du monde, même si on a l’impression que les faits sont suffisamment visibles et parlent d’eux-mêmes, les gens n’en auront qu’un aperçu, bien plus mince que ce que l’on imagine.
Et il y a un élément à ne pas négliger : Le cerveau humain. Comme la nature, il a horreur du vide. Il ira combler les trous avec ce qu’il imagine, ce qu’il entend (merci les bruits de couloir), ce en quoi il a envie de croire. Et ce n’est pas forcément à notre avantage.
Ce n’est pas parce que nous avons de « belles » valeurs que les autres vont y adhérer sous prétexte que l’on fait partie du même collectif. Il faut les convaincre que ces valeurs valent la peine de s’engager, et leur montrer qu’elles animent nos décisions et nos actes.
Aussi il ne suffit pas de se dire bienveillant (sujet à la mode…) : il faut prendre des décisions bienveillantes, être bienveillant, et montrer aux autres que l’on est bienveillant.
Il ne suffit pas de proposer une rétribution que l’on juge intéressante pour soi (sauver le monde tout de même !) mais il faut être en capacité de comprendre les besoins de ses collaborateurs, et de s’adapter pour les engager pleinement.
Aussi je pense que le marketing RH n’est pas du luxe. C’est une nécessité.